etaïnn zwer

Né·e en 1984, vit et travaille à Berlin, Allemagne.

On dit que les mots sont des armes. Chez etaïnn zwer, ils sont bien plus que cela. L’auteur-artiste, membre du collectif RER Q, parle de “couteaux (pour étaler du beurre)”. Ses mots, ainsi, sont tranchants et doux à la fois, ils sont pluriels, changeants, fluides, ils coulent les uns dans les autres, ou plutôt : se jettent les uns sur les autres, s'emboîtent comme dans des mêlées de corps, s’absorbent, se mangent (au beurre), dans une ivresse nocturne nommée désir. Des mots en chaleur et en couleur disent les corps et en deviennent, deviennent chair, se glissent sous la peau, entaillent, dissèquent, telles des lames de rasoir - des armes, donc, en fin de compte. L’écriture d’etaïnn zwer transpire l’urgence et la vitesse, haletante, elle nous embarque en mobylette débridée dans une course à travers des clubs de nuit à ciel ouvert, ambiance fête foraine abandonnée. Pendant sa résidence de 100 jours à Clermont-Ferrand, etaïnn zwer prend comme ligne de départ son dernier ouvrage, Bleu nuit, blouson rose, pour en tirer des formes performatives incarnées, afin d’ancrer ses mots dans un présent qui menace à tout moment de nous échapper.

instagram.com/etainn_zwer/

résidence

30.09.24 – 30.11.24

Résidence 100 jours,
à Clermont-Ferrand

24.01.25 – 02.03.25

Résidence 100 jours,
à Clermont-Ferrand

exposition

27.02.25, 18:30

Exposition,
à Artistes en résidence, la Diode, Clermont-Ferrand

Tongues and songs

Adele Dipasquale (IT), etaïnn zwer (FR), Sigrún Sveínsdottir (IS)

27 février 2025 18h30-21h00
à Artistes en résidence, la Diode
190, bd Gustave Flaubert, Clermont-Ferrand

Sigrún. Adele. etaïnn. Trois prénoms dont la musicalité est teintée d'une douce étrangeté pour les oreilles habituées aux consonances francophones. Trois prénoms qui pourraient appartenir aux Guérillères de Monique Wittig (1), récit rythmé par des listes de noms énigmatiques et hypnotiques. Les trois artistes qui y répondent ont été accueilli·es par Artistes en résidence à Clermont-Ferrand ces dernières semaines : Sigrún est islandaise et habite à Amsterdam, Adele italienne mais vit et travaille à La Haye, et etaïnn un·e français·e ayant élu domicile à Berlin. Chacun·e, avec son bagage culturel spécifique, joue avec le langage, les sonorités, les mots, les chants, les murmures. Que ce soit la poésie du désir d'etaïnn zwer, les chants d'opéra de Sigrún Gyða Sveinsdóttir ou les voix de l'au-delà convoquées par Adele Dipasquale, toustes donnent à entendre l'inattendu, le refoulé, l'oublié, ce qui est habituellement tu ou ignoré. Iels déterrent des écrits que l'académisme tente de silencier, donnent une voix à celleux qui n'en ont pas ou plus : minorités de genre, personnes racisées ou issu·es de classes sociales défavorisées, militant·es pour le climat ou la justice sociale… . Résonnent alors à la Diode une multitude de voix alternatives, de tous temps décrédibilisées car associées à la folie, à l'irrationalité, à des altérités menaçantes. Les artistes redonnent ici toute leur puissance transformatrice aux paroles capables de penser et de dire le monde autrement. Speaking in tongues, glossolalia (2), söngur sírenanna (3), lingue di fuoco (4), magical sayings (5) et écritures inclusives se joignent en une polyphonie radicale et haute en couleurs, à même de faire trembler les fondations de la domination, de bruciare il patriarcato (6), de prendre en soin vernd hinna glötuðu vistkerfa (7). Et qui sait, leurs vocalisations aux airs de révolution se termineront peut-être en un karaoké, polyglotte, militant et joyeux.

Ce texte a été écrit par une intelligence collective.

(1) Monique Wittig, Les Guérillères, Les éditions de minuit, 1969
(2) Speaking in tongues, littéralement "parler en langues", ou glossolalia, est une vocalisation de syllabes qui ressemblent à des paroles et qui n'ont pas de sens facilement compréhensible, souvent considérées par les croyant·es comme des langues divines ou spirituelles inconnues de la personne qui s'en fait le véhicule.
(3) Islandais pour "le chant des sirènes", mythologie grecque.
(4) Italien pour "les langues de feu", mythologie chrétienne.
(5) Anglais pour "les mots magiques, les sorts".
(6) Italien pour "brûler le patriarcat".
(7) Islandais pour "la protection de nos écosystèmes dévastés".